Worldbuilding

L’exposition Worldbuilding organisée par le commissaire Hans Ulrich Obrist a été initialement produite par la Julia Stoschek Foundation de Düsseldorf avant d’être adaptée pour le Centre Pompidou Metz. Son sous-titre, Jeux vidéo et art à l’ère digitale, induit qu’il s’agit de considérer l’esthétique du jeu vidéo dans l’art d’aujourd’hui.

Theo Triantafyllidis, Pastoral, 2019.

Parmi les œuvres qui sont jouables au niveau 3 du Centre Pompidou Metz, Pastoral de Theo Triantafyllidis, artiste basé à Los Angeles, invite le public à explorer un vaste champ de céréales via l’avatar d’une jeune bodybuildeuse. Il n’y a du reste d’autres possibilités que d’errer dans ce champ de blé ensoleillé délimité par des poteaux en bois. Avec comme rencontre improbable, celle d’un joueur de mandoline à tête d’animal. De quoi frustrer les video gamers tout en fascinant possiblement les amatrices et amateurs d’art à l’ère digitale.

Jonathan Horowitz, Free Tech Store, 2023.

Rappelons que le la pratique du worldbuilding, notamment en jeu vidéo, consiste à inventer des mondes oscillant entre réel et imaginaire. D’où la présence d’une telle création au sein de cette exposition. L’ère digitale dont il est question dans le sous-titre est évoqué différemment par Jonathan Horowitz qui, lui aussi, vit et travaille aux États-Unis. Ce dernier est coutumier du fait d’organiser des trocs quand on l’invite. Dans la zone de l’installation Free Tech Store, le public a tout loisir de déposer le matériel électronique dont il ne se sert plus pour se saisir de ce qui lui manque. Nous sommes ainsi rassurés sur la faible empreinte carbone de cette pièce, le matériel provenant essentiellement de Metz et de ses alentours. Cela dit, les décharges du monde entier regorgent de tels rebus informatiques. Le secteur du numérique induisant quelques désavantages, parmi lesquels celui d’une civilisation tout entière : la pollution.

Neil Beloufa & EBB, Screen-Talk, 2023.

Screen-Talk de Neil Beloufa & EBB compte parmi les œuvres davantage interactives que jouables. Les spectatrices et spectateurs peuvent opter pour les programmes vidéo de leur choix au sein d’une pièce associant la pratique du mapping au design d’interface. Mais ce qui est troublant, c’est le fait que cette série mettant en scène une pandémie ait été initiée par l’artiste français en 2014, soit bien avant celle qui nous affecta toutes et tous. On a pour habitude de considérer que les artistes, plus que jamais, s’approprient les grandes problématiques sociétales, mais ce serait omettre qu’il en est aussi pour les anticiper. Notons enfin que le contexte de réception des œuvres est tout aussi important que celui de leur émergence.

Jakob Kudsk Steensen, RE-ANIMATED, 2018-2019.

Citons, parmi les grandes questions sociétales de ces dernières décennies, celle d’une sixième extinction de masse évoquée par Jakob Kudsk Steensen Re-Animated avec un film en trois dimensions et une expérience en réalité virtuelle : le temps d’une rencontre avec l’oiseau Moho de Kauai dont le chant d’un mâle sans femelle a été enregistré en 1975 pour la dernière fois. La nature magnifiée par l’artiste danois ne devant pas nous faire oublier que les sons, cris ou chants qui disparaissent de la surface de notre planète sont autant d’alertes à prendre en considération tant qu’il en est encore temps. Avec la simulation d’une espèce animale qui ne peut plus être observée dans la nature, la posture de l’artiste l’ayant conçu et réalisé n’est autre que celle du lanceur d’alerte.

Koo Jeong A, Chamnawana (True me & i), 2017, détail.

L’animation en trois dimensions Chamnawana (True me & i) du Coréen Koo Jeong que l’on observe dans l’environnement de l’exposition est d’une étonnante économie de moyens. Au sein d’un espace noir, sans lumière aucune, donc signifiant le néant d’un écran étend dont même la machine à ignorer le calcul, deux êtres s’entremêlent dans une gestualité langoureuse. Le sens de cette séquence est peut-être à chercher dans le fragment de titre “Vrai moi et moi”. Il évoque les médias sociaux qui, de manière sous-jacente, sont omniprésents dans Worldbuilding. Le vrai moi, en ligne, n’étant pas nécessairement le moi réel. L’amour, dans cette chorégraphie de versions de soi, est fusionnel. On pense au mythe de Narcisse qui excluait le reste du monde pour se concentrer sur son reflet le menant à sa perte.

Jacolby Satterwhite, We Are in Hell When We Hurt Each Other, 2020.

De nombreuses autres séquences sont en visionnage au sein d’une black box dont We Are in Hell When We Hurt Each Other de Jacolby Satterwhite d’une durée de vingt-quatre minutes. Elle a l’allure d’un clip vidéo étiré aux étranges chorégraphies et aux multiples influences #afro, #queer, #game… La surenchère d’éléments visuels de différentes natures participant grandement, avec la musique qui est omniprésente, à nous maintenir dans l’univers de l’artiste. Si la notion anglophone de worldbuilding a un sens en art, l’approche résolument contemporaine de cet artiste américain tout particulièrement soutenu par la Julia Stoschek Foundation l’illustre parfaitement. Quant au Centre Pompidou-Metz, inauguré avec une exposition sur les chefs-d’œuvre, il nous incite avec cette autre exposition à en reconsidérer la notion à l’ère digitale.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Whiteface

Présenté à La Centrale à Bruxelles, Extra est une exposition où un artiste, Mehdi-Georges Lahlou, en invite une autre, Candice Breitz. Cette dernière y présente notamment l’installation vidéo deux canaux Whiteface où elle interprète les turpitudes existentielles inhérentes à la blanchité.

Candice Breitz, Whiteface, 2022. Installation vidéo deux canaux, couleur, 35’23”, boucle. Production Museum Folkwang, avec le support de Kunsthalle Baden-Baden. Vue d’exposition, Mehdi-Georges Lahlou & Candice Breitz – Extra, La Centrale, Bruxelles. Photographie Philippe De Gobert.

Candice Breitz (1972) est originaire de Johannesburg du temps de l’Apartheid et vit depuis 2002 à Berlin. Elle questionne les cultures populaires en pratiquant essentiellement la vidéo – qu’elle augmente parfois de photographies – au sein d’installations multipliant les flux d’images. Rompue à l’appropriation artistique de séquences hollywoodiennes comme à la mise en scène de gens ordinaires, elle sait tout autant interpréter des rôles, comme elle le fait pour l’installation Whiteface de 2022. Car c’est bien elle qui s’exprime avec les mots d’autrui, seule et face caméra quand elle n’est pas entourée de copies d’elle-même diversement grimées. Son allure évolue, mais la chemise d’un blanc immaculé perdure pendant les 35 minutes de la vidéo projetée en boucle. Régulièrement filmée en plan américain, comme c’est l’usage sur TikTok, elle s’adonne à la synchronisation labiale. Une autre tendance sur cette plateforme que les amateurs de la mise en scène de soi privilégient actuellement. Et ce, quel que soit le sujet abordé, divertissement, politique ou, inévitablement, désinformation.

Cette performance a de quoi surprendre. Tout d’abord il y a l’extrême unité d’une esthétique s’articulant autour de diverses coiffures, toutes blondes, et cette même chemise aux manches relevées fusionnant avec l’absence ou la pureté symbolisée par un fond blanc. Quant à l’actrice incarnée par ses multiples avatars, elle interprète une multitude d’échantillons sonores qu’elle surjoue avec un plaisir non dissimulé. Toutefois, sa présence à l’image semble ne pas correspondre tout à fait aux timbres des voix qui se succèdent. Or il convient de se retourner pour en comprendre la source télévisuelle, ou plus largement médiatique. L’installation vidéo est ainsi constituée de deux couches se faisant face. D’un côté il y a le video sampling de commentatrices et commentateurs de la blanchité qui renvoie à la pratique d’artistes ou vidéastes de la même génération, comme Omer Fast. De l’autre, Candice Breitz habille, si ce n’est texture, cette même séquence en performant de sa personne. Ce qui n’adoucit guère les propos originels allant de l’expression d’un racisme ordinaire à la théorie du grand remplacement.

L’installation vidéo Whiteface soulève de nombreuses questions ou problématiques que l’artiste a choisies de traiter avec une relative distance en les interprétant. Quand le sujet, en réalité, n’est autre que la peur d’une communauté de perdre les privilèges qui lui ont si naturellement été transmis. La question de l’information, ou plus exactement de la désinformation, est essentielle. Qu’il s’agisse de se contenter d’un seul canal télévisuel à la partialité affirmée comme Fox News aux Etats-Unis. Ou, d’une manière plus insidieuse, de se laisser enfermer dans sa bulle filtrante que les algorithmes façonnent au rythme de nos clics et commentaires sur les médias sociaux. Fort heureusement, l’installation dont il est question n’est accessible que dans le champ de l’art. On imagine aisément l’impossible modération des échanges exacerbés qu’elle pourrait produire en ligne. Où la déraison, inévitablement, l’emporterait sur le dialogue. Une telle création, dans le contexte “privilégié” – avouons-le – d’un centre d’art contemporain, ne peut que faire réfléchir aux racistes qui, ne nous le cachons pas, sommeillent en chacun d’entre nous, toutes et tous.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Fait machine, code sur le fil

Jeanne Vicerial, Prototype de jupe, 2014-2015.

L’exposition Fait machine des commissaires Margherita Balzerani et Noëlig Le Roux au MIAM de Sète rassemble un grand nombre de créations ayant une étroite relation au code ou à la fabrication. A l’instar du Prototype de jupe de l’artiste Jeanne Vicerial dont on connaît les très énigmatiques sculptures aux tissages denses de fil noir bien qu’ici le vêtement ne soit qu’une composante de l’installation incluant notamment la machine conçue par l’artiste et dont elle est issue. C’est par conséquent la pratique du tissage et son automatisation, mais à l’échelle d’une pièce unique, qui nous est présentée, au plus près du faire-artistique et en proximité tant avec la recherche que la mode.

Varvara & Mar, Circular Knitic, 2014.

Avec le duo Varvara & Mar, c’est une autre machine tout aussi autonome qui, littéralement, performe. Issue de procédés de fabrication open source, donc possiblement réplicable par toutes et tous, celle-ci tricote sous les regards des spectatrices et spectateurs. C’est donc une fois encore le processus créatif qui, tout au long de l’événement, prime sur la création que les artistes ont toutefois prévu d’accrocher dans l’espace de l’exposition. Par sa longueur attendue, celle-ci devrait permettre de tisser un parcours parmi les œuvres présentées.

Michel Paysant, Vase pour les yeux (Maison Ullens), 2020.

Les quelques pièces que présente Michel Paysant s’articulent autour de sa pratique artistique du eye tracking. L’artiste dessine par son regard augmenté ce que les machines ne font que reproduire. Nous savions que le dessin et plus largement la peinture étaient intimement liés au regard, et plus précisément à l’observation, ces performances nous le confirment. Quant au dessin de la fleur qui orne son Vase pour les yeux en porcelaine de Limoges, il est très strictement conséquent aux mouvements segment après segment de son œil que sa pensée a contrôlé.

Miguel Chevalier, Bella Donna Sive linus hypericum digitalis, 2021.

Les plantes de la série Bella Donna Sive linus hypericum digitalis de Miguel Chevalier appartiennent à la famille des Amaryllidacées. A un détail près puisque leurs graines ne sont autre que des fragments de code. Dans l’espace de l’image, elles émergent et croissent pour finalement se faner selon des cycles de vies artificielles anticipées par l’artiste qui nous en présente aussi les étapes de croissance en sculptures. Ainsi pétries par des procédés d’impression en trois dimensions, elles convoquent les organismes vivants que parfois des couches sédimentaires figent pour l’éternité.

Antoine Schmitt, Grand oblique (détail), 2016.

S’éloignant du tangible sans pour autant rompre totalement avec le réel régi par les lois de la physique, il y a les projections Grand oblique et Ondée sur cube oblique d’Antoine Schmitt. Dans ces deux installations, des myriades de particules de lumière pure n’ont d’existence que le temps de leur chute, aussi virtuelle qu’inexorable. Ces deux créations qui s’exécutent en temps réel témoignent de la prise en compte des pratiques génératives de l’art par les principaux acteurs de l’écosystème de l’art. Il n’est jamais trop tard. C’est aussi de cela dont il est question au Musée International des Arts Modestes de Sète.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Sommerer & Mignonneau

Interactive Plant Growing, 1992.

L’exposition monographique The Artwork as a Living System de Christa Sommerer & Laurent Mignonneau à l’OÖ Landes-Kultur de Linz en Autriche retrace trente années d’expérimentations artistiques. Parmi les plus anciennes, citons l’installation Interactive Plant Growing (1992) qui est devenue une pièce majeure de l’histoire des arts numériques. Effleurer les cinq plantes de l’espace physique revient à en activer les doubles virtuels vidéoprojetés. Nous nous sommes habitués à interagir sur notre environnement, pourtant, l’idée que ce soit au travers du vivant continue de nous émerveiller.

HAZE Express, 1999.

L’interaction est au centre des pratiques développées par les deux artistes mais ce sont les contextes qui font évoluer les problématiques abordées. Car avec HAZE Express (1999), c’est sur le paysage se déroulant inéluctablement que l’on agit via la vitre d’un wagon. Or les philosophes des sciences comme Etienne Klein ont pour habitude de comparer le temps à un train dont nous ne serions que les passagers. Dans ce cas, le choix par le duo du décor d’un train pour agir symboliquement sur le temps, comme nous le faisons aujourd’hui si intuitivement avec les chronologies de nos interfaces, s’avère être d’une justesse absolue.

Eau de Jardin, 2004.

Au fil du temps, donc de l’évolution des technologies utilisées par Christa Sommerer & Laurent Mignonneau, leur esthétique aussi a changé. Avec Eau de Jardin (2004), par exemple, les spectatrices et spectateurs qui agissent encore sur les excroissances de plantes dans l’image interagissent plus globalement sur le vaste monde qui leur fait face. Celui-ci s’est éclairci, c’est-à-dire qu’une fine brume matinale a remplacé le fond noir des écrans à tubes cathodiques au travers desquels ils ont tant observé le monde qui se mettait en place, bien avant que ne se développe l’imaginaire des Métavers.

The Value of Art, 2010.

Avec The Value of Art (2010), c’est sur le maché de l’art, ou plus exactement sur la valeur de l’art comme le titre nous l’indique, que les artistes se penchent avant que celle-ci ne devienne centrale à une autre tendance, celle des NFT pour Non Fungible Tokens. Les dispositifs techniques qui augmentent quelques peintures ainsi recyclées permettent de quantifier les temps que spectatrices et spectateurs passent à les observer. Cette économie de l’attention renvoyant à la pensée duchampienne qui veut que ce soit “le regardeur qui fasse l’œuvre », plutôt que la spéculation.

People on the Fly, 2016.

Enfin, avec People on the Fly (2016), c’est le public qui, entrant dans l’image de ce dispositif vidéo en circuit fermé, devient la composante essentielle de l’œuvre. Là, précisément, où nous sommes assaillis par des nuées de mouches virtuelles. Spectatrices et spectateurs initient alors quelques stratégies allant de l’attirance à l’évitement. Quand ce sont les insectes ou plutôt les algorithmes les faisant se mouvoir qui “en réalité” décident de leurs cibles. Ce dispositif résume à lui seul assez bien la démarche de Christa Sommerer & Laurent Mignonneau dont les créations sont à la croisée des actions des artistes eux-mêmes, des technologies de l’autonomie mises en place et des publics qui les activent.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Des Imaginaires Numériques

Dasha Ilina, Do Humans Dream of Online Connection? 2021.

La Biennale Chroniques qui se déploie sur les villes de Aix-en-Provence, Marseille et Avignon s’articule autour des Imaginaires Numériques. Le titre de l’installation Do Humans Dream of Online Connection? de Dasha Ilina présentée dans l’exposition États de veille de la Friche la Belle de Mai à Marseille illustre parfaitement l’univers de l’événement. Car s’il est un espace dédié à l’imaginaire, c’est bien celui des rêves que nous devons préserver comme l’ultime lieu propice à la déconnection.

Olivier Ratsi, Avancée immobile, 2022.

Quelques étages plus bas, on passe de l’intime au monumental avec le dispositif sonore et lumineux Avancée immobile d’Olivier Ratsi dont l’expérience est sensorielle, et qui constitue l’une des étapes du parcours d’installations en extérieur. Le lieu, ordinairement un parking, est littéralement effacé par ce qui évoque l’idée du passage et est à la démesure des imaginaires du future que développent les auteurs de science-fiction.

Pierre Pauze, Please Love Party, 2019.

Toujours à la Friche, mais au sein du Panorama, il y a l’exposition After Party qui regroupe les travaux d’artistes dont Pierre Pauze avec deux pièces. La première, Please Love Party, est une installation vidéo issue d’une performance associant un puissant imaginaire des années quatre-vingt, la mémoire de l’eau, à de possibles états modifiés de conscience. La seconde, xSublimatio, poursuit l’expérience aux protocoles résolument scientifiques sur la plateforme NFT faction.art. Or c’est peut-être précisément dans l’interstice qui relie l’espace muséal de celui du web3, que se situe l’un des futurs possibles du Crypto Art.

Dimitri Mallet, Silence Painting, 2015-2022.

A Aix-en-Provence, les lieux sont davantage éparpillés et c’est à la Fondation Vasarely que l’exposition collective Vivre sans témoin problématise l’absence sous diverse formes. Avec Silence Painting de Dimitri Mallet, le monochrome que l’on observe ne se transforme que durant notre silence. Commenter le bleu saturé de sa forme seconde revenant à le faire disparaître, spectatrices et spectateurs se doivent de dissocier le temps de la contemplation de celui de l’échange.

Donatien Aubert, Veille Infinie, 2022.

. A distance de marche de la Fondation, le 3 Bis F présente l’exposition monographique Veille infinie de Donatien Aubert. Au travers d’images de différentes natures entre autres sculptures, celui-ci développe une analyse de l’évolution dans l’histoire des moyens de communication allant du code morse aux médias sociaux. Notre sommeil y apparaissant comme le dernier des espaces à assaillir par les entreprises dont l’économie est basée sur l’attention.

Sophie Whettnall, Les étoiles ne dorment jamais, 2022.

Enfin, et parmi d’autres lieux de la ville, il y a le Pavillon Vendôme que Sophie Whettnall a investi sous l’intitulé des plus poétique Les étoiles ne dorment jamais. Elle y multiplie notamment les projections de paysages sur les papiers peints d’antan de cet ancien hôtel particulier. De la juxtaposition de ses deux couches d’informations, ô combien différentes, et à de multiples égards émerge une forme de langueur de l’avant des imaginaires numériques auquel on s’abandonne idéalement sans notifications.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Du paysage en Arles

Les rencontres qui se tiennent en Arles durant l’été depuis plus de cinquante ans se concentrent essentiellement sur la photographie. Bien qu’il y ait parfois des images en mouvement, sans omettre la Fondation Luma qui les consacre dans sa programmation depuis son inauguration l’année dernière.

Noémie Goudal, Inhale, Exhale, 2021.

Avec sa création Inhale, Exhale présentée à l’église des Trinitaires, Noémie Goudal inscrit sa pratique de la photographie dans le paysage au travers d’une performance filmée. Le public, dans l’instant de sa découverte, ne sait pas exactement ce qu’il observe. Les deux temps composant la respiration qui sont évoqués dans le titre de l’installation correspondent aux étapes de construction et de déconstruction d’un paysage. Les quelques éléments de décor qui augmentent le lieu sont en fait les seuls véritables acteurs qui lentement apparaissent pour enfin disparaître dans un même ordre. A l’apogée de son augmentation, le paysage n’est pas moins réel considérant l’aspect matériel des composants ajoutés. Au point que, parfaitement déconstruite, l’illustration photographique d’un palmier – une essence d’arbre implantée par l’image pour l’occasion – déjà nous manque. Le travail accompli par l’artiste se fait couche par couche, dans l’image comme dans le son et tout particulièrement quand crissements et vrombissements accompagnent le temps d’une réalité se diminuant.

Evan Roth, Landscapes, depuis 2016.

Il est aussi question de paysage au sein de l’exposition Chants du ciel organisée par la commissaire Kathrin Schönegg au premier étage du Monoprix d’Arles. Avec, notamment, l’installation vidéo Landscapes d’Evan Roth. Où une vingtaine d’écrans organisés en grappe magnifient des fragments de nature en les teintant de rose. Le temps, diversement ralenti selon les lieux filmés, ajoute à l’unité de style d’un tel cluster d’images en mouvements. Mais le véritable point commun à toutes ces séquences est tout autre, puisqu’elles ont été tournées là où trafiquent nos données en sous-sol. La vitesse anéantissant les distances quelles qu’elles soient que représentent les câbles Internet est en totale contradiction avec l’apparente quiétude des paysages du dessus. Comme si deux mondes se côtoyaient sans toutefois jamais parvenir à n’en faire véritablement qu’un. Et ce malgré cette tentative désespérée d’inscrire l’infrastructure de l’internet dans le paysage en la rebaptisant cloud tant les nuages sont omniprésents dans les paysages en peinture.

Arthur Jafa, Aghdra, 2021.

Enfin, il y a cette étendue à perte de vue de ce qui pourrait être de la lave craquelée, à peine refroidie, qu’agitent encore quelques forces telluriques des tréfond de la Terre. Si toutefois il s’agissait de notre planète d’un avant ou d’un après le vivant. L’espace de l’image d’Aghdra d’Arthur Jafa que projette la Fondation Luma au sein de la Grande Halle du Parc des Ateliers est celui du jeu vidéo. Le public n’ayant pour se raccrocher au réel que l’idée d’un soleil couchant qui se profile au-delà de l’horizon dont l’infime courbure atteste qu’il s’agit bien d’une planète. Ce travail est singulier dans la carrière de l’artiste car intègrement généré algorithmiquement. Ce qui l’est moins c’est la bande son de ce film de 85’ car elle se présente sous la forme d’un remix étendu aux sons graves amplifié de morceaux de musique afro-américaines ayant traversés le temps. Le rythme que parfois nous croyons reconnaitre constituant la seule trace d’humanité dans ce paysage audiovisuel sans véritable début ni fin évoquant un océan de sècheresse. Pourtant, on le contemple comme la narration sans suspens du possible d’un ailleurs, à mesure que nos chairs sont bercées par les infrabasses de quelques mélodies intemporelles.

Article rédigé par Dominique Moulon

Soleils martiens

L’exposition Soleils martiens de Félicie d’Estienne d’Orves qui se tient au Lieu unique a été organisée par son directeur Eli Commins en collaboration avec le commissaire associé Sean Rose. Intégrant la programmation du Voyage à Nantes, elle rassemble des installations de lumières et d’ombres donnant forme à la distance.

Félicie d’Estienne d’Orves, Eclipse II, 2012-2016.

Félicie d’Estienne d’Orves est une artiste de la lumière que le lointain inspire. Aimant la compagnie des scientifiques, et plus particulièrement celle des astrophysiciens, elle magnifie leurs découvertes ou connaissances. Pour exemple, ces barres en acier qui convoqueraient l’art minimal si des lumières ne les parcouraient lentement. Les pièces de la série Étalon lumière ont pour fonction de nous permettre de mesurer le temps que met la lumière d’objets célestes de notre système solaire pour nous parvenir. La lenteur, lorsqu’elle est extrême, en exprime l’éloignement tout aussi extrême. C’est avec de tels gestes artistiques que, dans l’épure incitant à la contemplation, l’artiste nous communique des informations à même d’activer nos imaginaires. Avec SN 1572 Tycho se présentant sous la forme d’une boite lumineuse qui laisse filtrer des couleurs, elle se réfère tant aux données qu’aux procédés d’observation dans le lointain. Sachant que les spectres de lumières émis par les astres renseignent les astronomes sur les natures de ces même astres, Félicie d’Estienne d’Orves brosse le portrait spectral d’une supernova thermonucléaire de la constellation de Cassiopée. C’est-à-dire qu’une fois encore elle emprunte à l’histoire de l’art cette manière qu’avaient certains peintres de l’abstraction américaine d’agencer les couleurs, en même temps qu’elle use des technologies de son temps – dans ce cas des diodes électroluminescentes – pour nous projeter dans l’imaginaire d’ailleurs dont seuls les scientifiques ont le secret.

L’exposition Soleils martiens nous incite tant à observer qu’à contempler. Considérant l’observation, c’est notamment celle d’une lamelle de météorite de métal dont elle a fait l’acquisition pour nous la présenter à la loupe. Il s’agit d’une Octaédrite dont la surface découpée est étrangement striée au point de ne rien évoquer de naturel. Comme si cet objet, extraterrestre par définition, avait été usiné par une machine que nous n’aurions pas conçue. Et l’on se prend à rêver de ne pas être les seuls dans cette immensité dont la nuit ne révèle que la proximité de quelques étoiles pourtant inatteignables si ce n’est par l’observation et/ou la contemplation. C’est ce que l’installation lumineuse Eclipse II illustre parfaitement. En reconstituant ce moment si rare où la Lune masque le Soleil, Félicie d’Estienne d’Orves se réfère tant aux scientifiques qui en profitent pour observer les éruptions solaires qu’aux civilisations anciennes qui, contemplant l’événement, se devaient d’en imaginer les récits. Quand leurs prêtresses et prêtres se devaient tout autant d’interpréter les passages si réguliers de la lumière à l’obscurité. C’était avant que le coucher de soleil, semblable à celui qui est projeté au Lieu unique, ne soit associé au romantisme d’instants partagés. Mais celui de l’artiste est particulier puisqu’il a été calculé selon des données collectées sur la planète Mars que les auteurs de sciences fiction ont si souvent fantasmée. Les sons de la compositrice Eliane Radique, que les amateurs de musique électronique connaissent bien, participent grandement à suspendre l’image en mouvement. Ils étirent l’instant pour que nous en fassions pleinement l’expérience de pensée tant il est assuré que pour l’essentiel d’entre nous, jamais nous ne vivrons ce qui reste une fiction pour les humains : un coucher de soleil sur Mars. Sachant que seuls des robots de la Nasa en ont fait l’expérience pour nous la procurer.

Et il y a ces espèces de tables sur lesquelles l’artiste a dressé des solides, parallélépipèdes ou sphères, auxquels elle associe des soleils artificiels de fin d’après-midi. Comme s’il s’agissait d’études d’ombres extirpées des anciens traités de perspective. Les ombres sont démesurées quant aux objets qu’elles prolongent. C’est ainsi que Giorgio de Chirico les peignait lorsqu’il voulait lui aussi dilater le temps de ses représentations métaphasiques qui, déjà, anticipaient notre relation à l’espace virtuel des métavers dont on parle tant aujourd’hui. Enfin, il y a ce triptyque de tirages photographiques témoignant des expériences de désert de l’artiste. Soucieuse de se reconnecter à la nature comme le faisaient ses prédécesseurs du Land Art, elle a voyagé avec le matériel lui permettant littéralement de se connecter à quelques objets célestes en pointant des rayons laser dans leur direction. Un résumé par l’image de ses pratiques consistant à associer lumière à connaissance.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Phylogenèse inverse

L’exposition Chronicles from a near Future conçue par la commissaire Ana Ascencio à iMAL Bruxelles regroupe deux installations d’envergure. L’une, intitulée Phylogenèse inverse, des artistes Golnaz Behrouznia et Dominique Peysson, propose de reconsidérer le vivant selon des imaginaires se situant à la croisée des arts et des sciences.

Golnaz Behrouznia & Dominique Peysson, Phylogenèse inverse, 2022.
Création scénographique de Rémi Boulnois. Design sonore de Florent Colautti.

L’installation Phylogenèse inverse a été créée en mars 2022 à l’occasion du Festival Canal Connect de Madrid. Et c’est dans une configuration similaire qu’on la retrouve au centre d’art iMAL de Bruxelles dédié aux pratiques et cultures numériques. Elle rassemble plusieurs pièces des artistes Golnaz Behrouznia et Dominique Peysson – qui est aussi scientifique –, autour d’un même concept imaginé par elles-mêmes : la phylogenèse inverse. Rappelons ici que la phylogénie est une discipline visant à étudier les liens entre les organismes vivants et ceux qui ont disparu. Alors que les deux artistes, littéralement, la renversent pour envisager des êtres vivants étant à même de revenir à des stades antérieurs au fil de leurs évolutions, de générations en générations. Sans s’interdire d’hybrider de telles chimères aux techniques ou technologies contemporaines pour nous mener selon un parcours “inverse” d’exposition jusqu’à l’origine de la vie dont nous ne savons si peu.

La forme de l’œuvre sculptée par la lumière et associant des objets en vitrines aux cartels les décrivant avec minutie est résolument muséale. Alors que l’imaginaire est essentiellement scientifique. Force est de reconnaître que la nature est inspirante. Pour exemple, il y a cette méduse nommée Turritopsis nutricula, originaire des Caraïbes, dont des chercheuses et chercheurs ont découvert qu’elle pouvait inverser le processus de son vieillissement ! Quant à la relative diversité des organismes présentés à iMAL, elle évoque l’extrême variété des espèces dont témoignent les schistes de Burgess au Canada datant de plus de cinq cents milliers d’années. C’est-à-dire quand la vie s’essayait sous des formes extravagantes qui ne sont jamais parvenues jusqu’à nous.

La visite de cette œuvre en exposition invite à en accepter les projets d’êtres vivants sans se soucier de leur viabilité ni distinguer l’inerte du vivant pour, simplement, en apprécier la poésie. C’est un bien autre regard sur l’évolution qui est proposé, invitant à reconsidérer l’idée même de progrès, un concept qui n’a jamais été autant questionné qu’en cette époque d’une post-modernité sans fin. L’idée étant, au terme du parcours à étapes que l’on est invité à suivre scrupuleusement, de s’approcher de cet instant lointain où la vie est subrepticement apparue à la surface de notre planète. Et aux artistes d’évoquer la comète du système solaire 67P/TG que les astronomes Klim Ivanovitch Tchourioumov et Svetlana Ivanovna Guérassimenko ont découvert en 1969. Bien avant que la sonde Rosetta ne renseigne d’autres scientifiques quant à la possible présence de vie sur d’autres planètes !Phylogenèse inverse est donc une installation qui s’observe comme le font ordinairement les scientifiques autant qu’elle se lit telle une fiction. Elle compte parmi ces œuvres dont l’imaginaire conduit à la connaissance. Rien n’est vrai quand tout nous apparaît vraisemblable, ou presque, et que la poésie des formes sans retenue aucune s’appuie sur des faits scientifiques établis. Les musées d’art et de science ayant en commun, à leur sortie, de nous rendre au monde avec plus de questions que nous n’en avions quand nous en avons franchi les portes.

Rédigé par Dominique Moulon pour ArtPress.

Je viens de te voir en rêve

Marion Roche, Je viens de te voir en rêve, 2022.

Nos rêves ne sont autres que des situations où l’on réassemble lieux, êtres ou objets qui nous sont familiers avec une extrême créativité. Nous y retrouvons par conséquent régulièrement des proches, d’où l’expression usuelle « Je viens de te voir en rêve » qui est aussi le titre de l’œuvre de Marion Roche. Il s’agit d’une sculpture dont la forme résolument organique convoque la nature car elle est structurée tel un arbre ou une fleur. Pour celles et ceux ayant une curiosité scientifique, le tronc ou la tige qui est en métal renvoie aussi au neurone comme nous le représentent les neuroscientifiques. A ce propos, Marion Roche a collaboré avec des chercheuses et chercheurs en neurosciences qui ont enregistré son activité cérébrale afin que celle-ci donne forme à quelques rêveries extirpées de sommeils paradoxaux.

Nos songes sont propices à la métamorphose au point que se les remémorer les altère. Quand cette plasticité est au cœur de ce que, dans cette création, on identifie comme des feuilles ou pétales. Rien, dans la partie supérieure de Je viens de te voir en rêve, n’est figé comme c’est la règle lorsqu’il est question du vivant. Parce qu’il est hydrophile, l’un des matériaux innovants composant cette sculpture la rend sensible à l’hygrométrie et plus encore à l’humidité que les conservatrices et conservateurs de musées d’ordinaire redoutent au point de multiplier les capteurs dans leurs institutions. Bien au contraire, l’artiste attend des médiatrices et médiateurs des espaces de présentation de son œuvre matérialisant ses rêves qu’ils l’humidifient de temps à autre afin de garantir que, jamais, elle ne soit véritablement identique à elle-même. Issue d’un procédé que l’on qualifie d’impression en quatre dimensions, celle-ci est donc résolument générative et cela à de multiples égards, tant dans les processus de sa fabrication que dans les conditions de sa monstration.

A l’entrée, il y a donc les rêves dont Marion Roche a témoigné au travers de séances d’électroencéphalographie. Se refusant d’y lire de simples données, elle les envisage comme autant de textures lui permettant de générer les éléments translucides dont nous savons l’extrême variabilité. Considérant les micromouvements dans la durée de cette création sculpturale, c’est à l’art cinétique que l’on pense inévitablement. On peut aussi y voir une évocation de l’aspect éphémère des œuvres de Land Art. Quoi qu’il en soit, dans sa globalité, la forme de Je viens de te voir en rêve est conséquente à l’observation scientifique du vivant comme à la considération de processus cognitifs. Et c’est en cela que le travail de Marion Roche s’inscrit dans la continuité des recherches des artistes-ingénieurs d’antan. De Léonard de Vinci qui pratiquait la dissection pour améliorer sa connaissance du corps humain à Wolfgang von Kempelen tentant de simuler les mécanismes de la pensée avec son automate joueur d’échecs.

Une gravure de Sébastien Leclerc datant de 1698 en atteste : il y avait autrefois une Académie des Sciences et des Beaux-Arts dédiée au Roy. De nos jours, de plus en plus d’artistes, à l’instar de Marion Roche, apprécient la compagnie des scientifiques. Ensemble, ils partagent les formes de créativités qui leur sont propres, sans omettre ce sens de l’observation qui leur est commun. Et, enfin, cette capacité à contempler, si ce n’est à rêver, tout en nous incitant à en faire de même avec les résultats de leurs recherches communes. De tout cela il est donc question avec Je viens de te voir en rêve, d’art et de science, comme des formes d’observations menant aux rêveries qui augmentent la connaissance de soi en cet environnement d’objets techniques qui est nôtre.

Rédigé par Dominique Moulon pour le Prix MAIF pour la sculpture.

Exposition Art Me!

Jeanne Susplugas, I will sleep when I’m dead, 2020.

A l’origine de l’exposition Art Me!, il y a la volonté de reconsidérer aujourd’hui ce qui unit les artistes à leurs œuvres qu’ils ou elles habitent, peuplent d’individus ou ouvrent au public. L’idée, donc, comme Allan Kaprow le suggérait déjà dans les années soixante, que rien ne doit séparer l’art de la vie comme l’attestent ses Essays on the Blurring of Art and Life (1993). Quand il est encore de nos jours des artistes pour pratiquer le happening. Que ce soit en toute discrétion, dans l’espace public, comme au regard de toutes et tous sur l’Internet, ou usant autant de la magie que de l’efficience des technologies contemporaines pour incarner leurs créations.

Force est de reconnaître qu’il est bien des techniques qui incitent les artistes à repenser la nature de leurs relations aux modèles qui, littéralement, “peuplent” leurs œuvres. On pense ici à celles du scanning, de la modélisation ou de la motion capture quand il ne s’agit pas d’intelligence artificielle. Les modèles ainsi représentés sont à l’exacte mesure de vrais gens. Des détails, comme on pourrait le penser, mais qui sont de nature à renforcer l’empathie d’un public se reconnaissant inévitablement dans un geste ou une posture étrangement si familière.

Mais les vraies révolutions, dans l’art, se jouent aussi dans les démocratisations des pratiques artistiques au travers d’innovations grand public allant du film Kodak à l’iPhone d’Apple. Sans omettre les plateformes de partage, là précisément où les pratiques artistiques se mêlent aux pratiques amateurs, sans que l’on sache bien qui influence qui ! Combien d’artistes se fournissent, en effet, en images en les traquant par leurs noms d’indexation au royaume des émojis pour en générer des collages se poursuivant bien au-delà des cadres ?

Enfin, il y les œuvres dont nous sommes les héros. Des créations dont on fait l’expérience, tant par la manipulation que dans le virtuel. En interaction, nous magnifions des objets techniques. En immersion, sans corps aucun, nous devenons la composante essentielle de l’œuvre que l’on achève. Quand nous ne sommes pas, tout simplement, l’œuvre elle-même. Comme les artistes du happening et plus largement de la performance qui, dans l’action, non seulement font acte de création, mais aussi sont création. Ce qui nous renvoie à la traduction française, plus précise encore, de l’ouvrage d’Allan Kaprow : L’art et la vie confondus.

Avec Aram Bartholl, Chun Hua Catherine Dong, Mikhail Margolis, Sabrina Ratté, Marie Serruya, Pierrick Sorin,  Jeanne Susplugas, Penelope Umbrico, Universal Everything, Éric Vernhes et Du Zhenjun à la galerie Charlot du 21 avril au 30 juillet 2022.