Qui associerait encore l’informatique à l’apparente froideur de ses composants allant du silicium aux métaux de différentes natures ? Lorsqu’une informatique affective s’inscrit à la croisée des technologies de l’information et des sciences cognitives. C’est là le champ de recherche de Frederik De Wilde dont les pratiques oscillent généralement entre les arts et les sciences. Le chiffre sept inclus dans le titre de son dispositif Syn7 présenté actuellement au Centre Wallonie-Bruxelles renvoie au nombre des émotions humaines universelles que les machines apprenantes semblent progressivement découvrir en nous. A condition, une fois encore, qu’on les alimente en grandes quantités de données, ici en joie ou en tristesse entre autres émotions. Equipée d’un système de reconnaissance faciale, Syn7 nous scrute au moins autant qu’on l’observe. Les profils affectifs collectés sont traités en temps réel par l’œuvre qui modifie son apparence en conséquence. Les sons, lumières et couleurs qui la magnifient sont à l’image des états émotionnels de celles et ceux qui se prêtent au jeu. Spectatrices et spectateurs ont par conséquent une responsabilité non intentionnelle sur l’aspect de l’œuvre qui tient ici rôle de convertisseur d’émotions. Bien au-delà d’une efficacité que l’on ne remettra pas en question, c’est l’imaginaire des participantes et participants qui complète l’œuvre par leurs commentaires. Quand, dans le doute, nous octroyons souvent plus de pouvoirs aux machines qu’elles n’en ont réellement. Et que la précision des instruments de mesure, sans l’interprétation qui la complète, n’est guère opérante. Nous sommes donc là face à une forme d’interprétation en cascade : que pensez-vous de ce qu’une machine voie en nous ? Voilà une question du XXIe siècle que soulève une œuvre d’interface !
Article rédigé par Dominique Moulon