
Paul Duncombe, Shelters, 2025, détail.
La pratique artistique de Paul Duncombe est de nature exploratoire. Il aime la compagnie des scientifiques lui donnant accès à des mondes qui ne sont pas tout à fait nôtres. Dans l’océan Pacifique, son œuvre se construit au fil de plongées sous-marines dont ils remontent les indices lui permettant de produire, en atelier, les images et les sons qu’il présente en installation comme en performance. L’une de ses préoccupations essentielles, c’est le vivant et ses transformations en cette ère de l’anthropocène. Alors il l’observe, notamment à des profondeurs où la lumière se raréfiant ne parvient plus à activer les couleurs. A moins que ce passage au noir et blanc, concernant les récifs coraliens, ne soit dû au réchauffement climatique dont nous savons les causes. Contraint parfois de déléguer ses observations à celles et ceux qui pratiquent une plongée technique, il les équipe de caméras en les accompagnant via un drone sous-marin. Avec les données collectées, il représente ces étranges territoires où l’animal, sans l’humain, continuerait d’évoluer en symbiose avec le végétal et le minéral. L’usage de procédés incluant la photogrammétrie lui permet de mouvoir ses caméras virtuelles avec plus de fluidité au sein de paysages d’ailleurs à la relative transparence. Ayant à sa disposition un microscope électronique, il poursuit ses investigations à l’échelle des micro-organismes habitant les coraux pour en découvrir les structures. Le rendu évoque les pratiques méticuleuses, pour ne pas dire obsessionnelles, du dessin. Soumettant des prélèvements à un éclairage infra-rouge, il en révèle la bioluminescence qui, dans l’obscurité des profondeurs, est vecteur de langages pour les vivants.

Paul Duncombe, Shelters, 2025, CWB / Paris, Ville de Caen, Région & DRAC Normandie.
Avec Paul Duncombe, l’espace d’exposition prend l’allure d’un laboratoire où l’expérience esthétique s’articule autour d’observations minutieuses. L’artiste conçoit ses propres dispositifs de monstration lui permettant notamment de classifier des organismes aquatiques aux formes les plus diverses. Des mollusques et autres crustacés qui jamais ne croisent nos chemins, mais subissent pourtant les conséquences de nos existences mêmes. Lorsqu’il se focalise sur une larve de poisson, c’est pour scruter ses palpitations qui, à la mesure infime de sa taille, renseignent sur l’extrême fragilité d’un écosystème global. Et quand de ces vivants il ne reste que les squelettes externes ou coquilles, il use d’éléments radioactifs pour en tester les niveaux de protection si le pire arrivait. Car l’œuvre que Paul Duncombe tisse au fil de ses expériences allant du milieu naturel au laboratoire d’exposition vise, au-delà du plaisir esthétique qu’elle procure, à éveiller nos consciences.